Paralysie totale sur Internet
La République démocratique du Congo perd chaque jour qui passe les attributs de sa souveraineté. Généralement par la faute de ses dirigeants. Ainsi, des secteurs relevant directement
de la compétence de l’Etat sont confiés à des individus, souvent basés en dehors du territoire national. C’est le cas du domaine Internet «.CD », identifiant de la RDC sur le plan international.
Depuis 48 heures, ce domaine est bloqué – à partir de son serveur central basé en Afrique du Sud. Ainsi en a décidé son gestionnaire, un sujet congolais opérant sous couvert de la SCPT. Si le
ridicule pouvait tuer.
Tous les internautes qui utilisaient le domaine «.CD » ne savent plus à quel saint se vouer. Les fournisseurs d’accès à l’Internet sont tournés en dérision. Depuis le mercredi 27 novembre 2013,
le domaine « .CD » de la République démocratique du Congo ne s’affiche plus sur les écrans d’ordinateurs. Le pays n’est plus visible sur le cyber espace. Toutes les adresses Internet logées
dans le domaine « .CD » ne passent plus. C’est le cas des sites : www.bcc.cd; www.primature.cd; www.ministeredubudget.cd, etc.
Pour ceux qui connaissent l’impact que joue l’internet aujourd’hui dans les affaires, le manque à gagner est énorme pour les fournisseurs d’accès à l’Internet. Que s’est-il passé pour qu’un individu arrive à pousser son outrecuidance plus loin ?
En effet, depuis plusieurs années, le serveur principal de la RDC est logé en Afrique du Sud et, c’est CONIC, une firme privée qui en assure la gestion administrative alors qu’il existe un arrêté
qui attribue à la Société congolaise de poste et télécommunication (SCPT) la gestion dudit serveur. Le mal était donc consommé dès le départ.
En République sud-africaine, le point cd était géré, au nom de la SCPT, par un certain Cris Tshimanga. Démis de ses fonctions pour « mauvaise gestion », M. Tshimanga veut donc désorienter tous
les usagers point Cd vers point Com. En bloquant le domaine «.CD », il bloque toute une nation, avec tout ce qu’on peut compter comme conséquence et tout son corollaire de malheurs. Comble
de tout, Cris Tshimanga est introuvable et ne répond à aucune communication. Joue-t-il au chantage ? A-t-il des revendications légitimes pour narguer tout un peuple ?
Pourtant, selon des sources proches de la SCTP, la RDC avait informé l’ICANN (l’instance mondiale qui gère les serveurs) de la démission de M. Tshimanga, agent commis par la société congolaise à
la gestion du serveur.
L’interpellation sans suite de Mutinga
Dans une
enquête diligentée par la Chambre haute, le sénateur Modeste Mutinga, président de la commission mise en place à cet effet, a
fustigé ce problème. Malheureusement, les conclusions de la commission Mutinga n’ont pas été prises en compte par les décideurs.
Abordant la gestion de ce domaine « .CD », la commission sénatoriale exprimait ses inquiétudes en ces termes : « Son champ d’application est à ce jour plus vaste qu’aucune société moderne ne peut
harmonieusement fonctionner sans une fenêtre sur le monde à travers l’Internet ».
Le rapport rendait compte, en même temps, des péripéties qui ont entouré la gestion de ce domaine. Selon ce rapport, cet important instrument d’identification nationale a toujours échappé à la RD
Congo. A l’avènement de l’AFDL, notait-il, le « .CD » était géré à partir de l’Allemagne pour la partie serveur alors que le volet commercial était assuré depuis Singapour ! C’est l’ex-ADG
Jean-Pierre Muongo de la SCPT qui s’est battu pour récupérer le «.CD». Face à la faiblesse de la SCPT de cette époque, le choix est tombé sur Telecom, un opérateur basé en Afrique du Sud. C’est
un sujet congolais qui devait s’occuper particulièrement du «.CD» sur le plan technique alors que la SCPT, elle-même, en assurait la partie commerciale.
Mais, suite aux tiraillements entre Congolais, le point de charge installé ailleurs et mal géré n’apporte rien au Trésor public. Le manque à gagner pour la RDC se compte en millions de dollars américains. Il suffit de prendre l’exemple de la France qui, avec ses 3
millions d’entreprises utilisant le domaine «.fr», l’Etat français perçoit annuellement des millions d’euros en termes de droits et taxes. De la même manière, la RD Congo aurait pu tirer des
revenus additionnels, en rentabilisant son domaine «.CD».
Malheureusement, toute la manne financière générée par la gestion de ce domaine se volatilise entre Kinshasa et Johannesburg.
Les conséquences sont également inestimables en termes sécuritaires. Sur le plan sécuritaire, tant de l’Etat que des secrets d’Etat, la RD Congo ne s’est pas protégée, en cédant chez un tiers la
gestion de son domaine « .CD ». Elle s’est donc exposée, se livrant à la merci de tout celui qui voudrait pénétrer tous ses secrets. Les mails des officiels, les sites des structures étatiques…
ne sont pas sécurisés. Quiconque voudrait fermer ces sites de l’extérieur peut le faire ! Quiconque tiendrait à trafiquer les courriels des institutions étatiques peut aussi à loisir le réussir.
C’est ce qui vient de se passer depuis 48 heures à partir de l’Afrique du Sud.
Le gouvernement interpellé
Kinshasa devra s’expliquer sur le pourquoi d’un tel désarroi qui n’est pas loin d’une humiliation pour toute une nation. Comment a-t-on confié à un individu, fut-il expert, la gestion d’un
domaine aussi sensible et stratégique de tout un pays ? Toutes les sources indiquent que M. Tshimanga n’a jamais été cadre de la SCTP. Pire, ce gestionnaire fugitif avait hérité la gestion de ce
serveur d’un agent rwandais qui l’a manipulé pendant de longues années. Qui lui a confié cette lourde tâche ? Qui sont ses collaborateurs à Kinshasa ? Le gouvernement devra faire toute la lumière
afin que l’affaire soit tirée au clair et qu’à l’avenir, de telles erreurs ne puissent plus se répéter.
Par ailleurs, le ministère qui a en charge les télécoms devra faire diligence pour vite réparer l’impair afin de rassurer les opérateurs économiques et épargner le pays du manque à gagner qu’il faut déjà comptabiliser à partir du mercredi 27 novembre 2013. Après s’être flatté pour la
matérialisation de la fibre optique, on devrait être en mesure de veiller à toutes les zones d’ombre qui constituent encore une pesanteur de taille dans ce domaine névralgique des télécoms.
L’image et la crédibilité du pays en dépendent.
Encadré
Domaine national de premier niveau
Un domaine national de premier niveau (aussi connu sous les noms anglais de country code Top-Level Domain ou ccTLD) est un domaine de premier niveau associé à un pays ou un
territoire, indépendant ou non.
Exemples : .be pour la Belgique, .ca pour le Canada, .ch pour la Suisse (Confœderatio Helvetica), .fr pour la France, .it pour l’Italie.
Les domaines nationaux comportent tous deux lettres, correspondant pour la plupart au standard ISO 3166-1 des codes de pays. Inversement, ce sont les seuls domaines de premier niveau
à comporter deux lettres.
La création et la délégation de la gestion des domaines nationaux est de la responsabilité de l'Internet Assigned Numbers Authority (IANA). L'IANA est une composante de l'ICANN,
l'autorité suprême de régulation de l'Internet.
La liste des domaines de premier niveau d'Internet compte près de 300 domaines de premier niveau. On distingue :
- un domaine de premier niveau spécial ;
- environ 20 domaines de premier niveau génériques ;
- environ 260 domaines de premier niveau nationaux.
Chaque domaine de premier niveau est géré par une organisation qui est chargée d'allouer (éventuellement de manière commerciale) ses sous-domaines.
Les domaines génériques se divisent en domaines génériques non commandités et en domaines génériques commandités. D'une manière générale, un domaine générique non commandité obéit à
des règles établies par l'ensemble de la communauté Internet représentée par l'ICANN alors qu'un domaine générique commandité obéit à des règles établies par un commanditaire représentant la
communauté étroite qui utilise le domaine.
Les domaines génériques non commandités se divisent en domaines génériques non commandités non restreints et en domaines génériques non commandités restreints. Les domaines non
restreints sont ouverts à tous, quels que soient leurs domaines d'activités, alors que les domaines génériques non commandités restreints sont destinés à des organisations ou des personnes
possédant des caractéristiques précises (tout comme les domaines commandités).
En revanche, contrairement aux domaines commandités, les demandes de sous-domaines dans des domaines génériques non commandités restreints ne font pas l'objet d'une validation avant
l'attribution du nom de sous-domaine.
Les domaines génériques commandités sont gérés de façon stricte par un commanditaire. Le commanditaire, qui a reçu son autorité de l'ICANN, a beaucoup de latitude dans l'établissement
des règles et dans la gestion du domaine qui lui est attribué. L'une des fonctions du commanditaire est de s'assurer que le demandeur d'un sous-domaine possède bien les caractéristiques qui sont
affichées par le nom du domaine. Ainsi le commanditaire du domaine .museum s'assure qu'un demandeur est bien un musée, une association muséale ou un membre de la profession muséale.
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